La reconstruction du Havre répond à des impératifs d’urgence, de robustesse, d’économie et de modernité. Auguste Perret maîtrise la technique du béton armé depuis des décennies et développe un style sans ornement qu’il qualifie de « classicisme structurel ». Il acquiert la notoriété dès 1913 avec le Théâtre des Champs-Elysées à Paris, poursuit son œuvre dans l’entre-deux-guerres avec l’église Notre Dame du Raincy ou la Tour d’observation des montagnes de Grenoble.
La mission qui lui est confiée au Havre est de loin son plus grand chantier. Son Atelier conçoit l’ensemble de la reconstruction. Il dessine un plan orthogonal, composé d’îlots carrés de 100x100m, autour de trois ensembles architecturaux majeurs : la place de l’Hôtel de ville, la Porte Océane et le Front de mer sud. Le tracé rectiligne des rues dégage de larges perspectives, structure l’alignement des façades des immeubles et accentue l’impression de luminosité. Auguste Perret règle également tous les détails avec un remembrement du sol, la généralisation de la co-propriété et des HLM, des immeubles standardisés aux toits en terrasse, aux poteaux de béton reliés par des poutres de 6 mètres entre lesquelles de larges ouvertures favorisent la luminosité et l’aération. Les appartements disposent de tout le confort moderne : séjour, cuisine, coin-repas, salle de bain... De grands bâtiments rythment l’ensemble urbain : l’Hôtel de Ville, l’église Saint-Joseph... Auguste Perret voulait rendre le « béton luxueux » en variant les textures, les coloris. Après lui, des architectes se sont attelés à varier ses formes, comme Oscar Niemeyer en 1982, en construisant la Maison de la culture de la ville (Le Volcan) dans la perspective du bassin du Commerce.
Longtemps critiqué, trop moderne pour les uns, trop classique pour les autres, le centre-ville du Havre est aujourd’hui reconnu comme l’un des plus grands projets architecturaux du XXe siècle. Il est inscrit depuis le 15 juillet 2005 sur la prestigieuse Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, comme le témoignage de l’architecture moderne française. Pour l’ampleur de son patrimoine contemporain, Le Havre est aujourd’hui comparable à quelques rares villes de renommée internationale : Brasilia, Chandigarh, Tel Aviv.
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Dresde est une ville allemande, capitale politique et deuxième ville la plus peuplée de la Saxe après Leipzig grâce à ses 530 000 habitants. La ville est surtout connue pour avoir été presque entièrement détruite pendant la Seconde Guerre mondiale par les bombardements alliés. Pourtant, le style architectural du centre-ville ne le laisse pas supposer. De nombreux monuments comme l'opéra Semper, le palais Zwinger ou encore la Frauenkirche, l'église principale de Dresde, rappellent l'architecture baroque et on surnomme parfois Dresde « La Florence de l'Elbe ». Ce paradoxe s'explique par la décision des autorités allemandes à la fin de la guerre de reconstruire Dresde à l'identique. C'est un choix que toutes les villes détruites pendant la Seconde Guerre mondiale n'ont pas fait. Par exemple, il a été décidé pour Le Havre, la grande ville la plus détruite de France, de faire table rase des anciennes structures. Les bâtiments ont été reconstruits en béton et le plan général de la ville s'est fondé sur une trame orthogonale.